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Jeudi matin, Michael reste seul... avec un chien.

                    Vers 10h30, Michael se dit que cela faisait 24 heures qu’il avait appris la disparition de Simon.
24 heures. Le temps lui semblait si long alors que les événements se bousculaient les uns contre les autres. Michael détestait cette impression de ne rien maîtriser.
Depuis la veille, il attendait que les choses se passent... Il en avait pourtant l’habitude. Depuis quelques années, il avait l’impression d’avoir mis sa vie entre parenthèses pour observer celle des autres. Il regardait, neutre et discret. Il ne participait pas. Les autres s’agitaient, très peu le remarquaient et il aimait ça. Enfin, au moins, il savait où il en était.
Mais, depuis 24 heures, il ne savait plus vraiment. Dans cette histoire de disparition, était-il acteur ou observateur ?
Au bout d’un certain temps, il se dit qu’il était un acteur qui ne pouvait rien faire, ce qui lui semblait être la pire des situations.
Simon, lui, savait ce qu’il voulait faire. Probablement. Bertrand Pratzen tirait les ficelles. Pinter Zymot cherchait Simon. Kitty, elle, savait qu’elle ne pouvait rien faire. Betty, par contre, était sans doute dans une situation plus compliquée... Et lui ?
Pratzen et Simon essayaient de l’attirer de leur côté. Pinter Zymot lui avait demandé de l’appeler au moindre nouveau détail.
Il y avait donc un choix.

                     Pour réfléchir à tout ça, Michael s’était assis sur deux petites marches de pierre qui donnaient sur un trottoir.
Il fixait les pieds des passants qui défilaient sans le voir. Ca le rassurait pendant qu’il réfléchissait.
Il avait enregistré le numéro de Pinter Zymot sur son téléphone. Il n’avait plus qu’à appuyer sur une touche pour le prévenir. Sans trop y croire, il avait aussi appelé le téléphone portable de Simon mais il n’avait pas laissé de message.
Jusque là, Michael avait isolé la seule question vraiment primordiale : Simon était-il en danger de mort ?
Si oui, il fallait appeler immédiatement Pinter Zymot. Si non, il suffisait d’attendre sans chercher à agir. S’il y avait un doute...
Normalement, dans le doute, il savait qu’il devait appeler.
Pourquoi n’appelait-il pas ? Pourquoi n’avait-il pas essayé de retenir Bertrand Pratzen ? Pourquoi ne s’était-il pas jeté sur lui, comme il l’avait crié à Simon ? Vu le gabarit de Pratzen et l’urgence de la situation, il aurait pu en faire plus.
Que lui reprocherait-on si Simon était retrouvé mort ou s’il ne revenait jamais ? Que se reprocherait-il à lui-même ?
Pourtant, même avec cette idée en tête, il n’appelait toujours pas.
« Dans ses rêves, on ne peut pas imaginer sa propre mort... »
En fait, même dans la vie réelle, la mort lui semblait être une idée bien vague.
« Simon va mourir. Il est peut-être déjà mort. »
Qu’est-ce que cette phrase signifiait pour lui, assis sur ce trottoir ?
Il a disparu. D’accord. Il a été enlevé de force. D’accord. Il a peut-être été agressé... séquestré... torturé... Ses parents souffrent. D’accord. Il est mort...
« Il va mourir. Fous-toi vite cette idée dans la tête et appelle les flics ! »
« Non, attends encore un peu. Il va se passer quelque chose. Pour t’aider à choisir. »
« Il va mourir. »
« Au fond de toi, tu n’y crois pas vraiment. »
« Il y a toujours un risque. »
« Et alors ? Ton appel n’y changera rien. »
«  Quel connard ce Simon ! »
Quelle heure était-il lorsque Michael remarqua dans son champ de vision une forme qui ne bougeait pas devant lui ?
C’était un chien.

                      Un petit chien beige clair, presque jaune, était assis devant lui et le regardait tranquillement au milieu des chevilles des passants.
«  Qu’est-ce qu’il me veut celui-là ? »
« Rien. Un chien ne demande rien. Il attend, c’est tout. »
« Il ne juge pas les gens. »
Michael tendit sa main droite en direction de l’animal. Il approcha sa truffe et il commença à lui lécher gentiment les doigts. Sans s’arrêter.
En ces instants de questionnements profonds, Michael se laissa faire et il sut apprécier les chatouilles prodiguées par le petit animal.
« Un peu d’affection gratuite. »
Si un passant s’était arrêté pour regarder Michael, il l’aurait même vu sourire.
« Alors... d’où vient-il ? »
« Il a l’air propre. Il porte un collier. »
« Rien d’écrit dessus. Un numéro. Allez, viens là, mon beau. »
Il prit le petit chien dans ses bras et lui gratta gentiment le dos et le menton pendant que lui continuait à lui lécher les doigts.
« J’aimerais bien le garder. »
« Profites-en vite avant que son maître n’arrive en gueulant. »
« Finalement, c’est ça l’ami idéal. »

Il s’occupa du petit chien jaune jusqu’à ce qu’un message arrive sur son téléphone. Il était déjà 11h52.
Et, pour Michael, c’était la deuxième bonne nouvelle de la matinée : Kitty répondait à son message de 9h24 dans lequel il lui avait proposé de venir manger un sandwich à la terrasse du snack plutôt que de rester à la cantine. Elle était d’accord. Il était temps d’y aller.
Michael se leva et déposa le petit chien par terre.
« Tu m’accompagnes ? »
Les marches de pierre étaient à l’ombre mais le trottoir était au soleil. Il faisait beau ce jour-là.

 

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